Ne pas finir un WOD dans le Time Cap, c’est être Scaled. Désolé. Il va falloir effacer le « RX » à côté de votre nom.
Je ne peux pas m’attribuer le crédit de cette merveille de perspicacité. Il faut le laisser à Karen Katzenbach, de 30A CrossFit, qui a partagé cela lorsqu’elle a modifié un training pour un athlète fictif – mais pourtant si réel – lors d’un des articles « 60 Second Scaling » du Centre de Formation des Journalistes (CFJ).
Cet entêté de Drake voulait faire un WOD tel que proposé, sans y apporter de variation ou modification (RX), malgré le fait de devoir réaliser 10 rounds de 10 HSPU et 3 Clean & Jerk à 85 kg.
Le poids étant à seulement 10 kg de son RM1. Le Time Cap était réglé à 16 minutes, ce qui laisse environ 96 secondes par round.
C’est clairement un WOD très difficile, qui demande à l’athlète de lifter rapidement une charge assez lourde. Pour pouvoir terminer dans le Time Cap, l’athlète doit être capable d’enchaîner proprement les reps avec une charge conséquente bien que sous-maximale, ainsi qu’un gros volume de HSPU avec peu de repos.
Notre homme, Drake, veut bien entendu le faire en « RX », même s’il va devoir prendre 40 secondes de récup entre chaque rep de Clean & Jerk. Il va supplier, négocier, jouer la carte du charme et beaucoup de coachs abdiqueraient en sa faveur et le laisseraient passer complètement à côté de l’objectif du WOD. Drake finirait certainement 5 rounds sur les 10 demandés et irait fièrement vers le tableau gribouiller la mention « RX » à côté de son nom (ou cliquer sur la pastille si sa salle utilise Wodify).
Katzenbach ne le laisserait pas faire.
« Je lui ferais remarquer que dépasser le Time Cap est autant une adaptation (scaling) que d’utiliser un poids plus léger et que c’est la plus mauvaise solution », écrit-elle.
C’est une des meilleures idées que j’ai entendue récemment, même si j’admets que de temps en temps les coachs doivent permettre aux athlètes de ressentir la satisfaction d’avoir lutter au travers de quelque chose qui met à mal leurs capacités et leur détermination. Mais pour le cas de Drake, je suis à 100 % d’accord avec Katzenbach.
Le Dragon, c’est très RX. Dépasser le cap de 10 minutes l’est beaucoup moins. (Adam Bow)
On sait tous à quel point la mention « RX » est puissante. On en a vu des athlètes saigner, vomir, tomber dans les pommes pour deux petites lettres arrachées à un marqueur quasiment sec. D’un autre côté, on en a vu mentir et tricher pour se voir accorder les deux fameuses lettres. Tous les coachs de CrossFit du monde ont déjà vu un athlète marquer RX après un WOD avec des Chest To Bar alors que le « Chest » n’a jamais touché la « Bar » du workout.
Je fais donc la suggestion pour une nouvelle règle : si tu te fais cuter, t’es pas en RX.
Bien sûr, cette règle nécessite de programmer des Time Cap réalistes aux WODs proposés. Programmez un Fran à 100 kg et il va forcément falloir instaurer un gros Time Cap et admettre qu’on est sur du travail de force.
Une bonne programmation doit aller de pair avec une excellente gestion du cours. Les coachs doivent prendre le temps avant le WOD d’en expliquer l’objectif. Rien que ce petit speech peut être suffisant pour remettre les athlètes légèrement entêtés sur les bons rails et une petite minute d’attention accordée à chaque personne pendant l’échauffement permettra au coach de valider ou non la charge qu’un athlète va utiliser, lui permettant de finir dans le Cap et de tirer le maximum de profit du WOD.
Mais les têtes de mule et ceux qui lient le RX à leur ego n’écouteront rien. Ils seront déjà en train de planifier leur récup et comment ils vont casser leurs sets, au post Instagram qui suivra et au temps qu’ils vont mettre à leur rival de toujours. Ils n’entendent rien. Ils vont même jusqu’à ignorer les instructions données. Soit de manière bien flagrante, ou alors avec un joli sourire et quelques mots doux. Les pires d’entre eux iront jusqu’à mentir aux coachs et changer les poids pendant que ces derniers ne regardent pas. Ces pernicieux personnages devraient se faire sortir de votre Box sans plus de manières.
Face à ceux qui prônent « le RX ou la Mort », vous devez manier le marqueur tel Gandalf manie son bâton. Établissez les règles dès le départ et faites-les respecter dans l’intérêt de la Santé, la Sécurité, l’Équité et le Fitness.
Adaptez de manière intelligente : reconnaissez lorsque vous travaillez sur la Force et lorsque vous travaillez le Conditioning. (Brian Malloy)
« – Hé Drake. L’objectif d’aujourd’hui est de travailler sur le Conditioning, on n’est pas sur un Heavy Day. Les meilleurs athlètes de la Box ont un Clean and Jerk à 145 kg et vont faire du Touch and Go lors des 10 rounds de 3 reps. Ils vont sans doute finir dans les 13 minutes. Tu devrais charger ta barre à 60 kg et en faire de même. Faire le WOD à 85 kg te fera louper le Time Cap et l’objectif.
– Ouais mais je veux le faire en RX !
– Manquer le Time Cap, c’est être Scaled. Tu ne peux pas écrire RX sur le tableau si tu te fait cuter. De toute manière, je veux que tu fasses 30 Clean and Jerk et 100 HSPU en moins de 16 minutes. Si tu arrives à faire ça à 85 kg, tu pourras marquer RX au tableau. »
Quand on y pense, l’idée est vraiment très simple et tellement élégante. Dans le style CrossFit le plus pur.
Réfléchissez-y. Qu’est-ce qui est le plus important dans le WOD décrit plus haut : la charge ou le volume réalisé avec intensité ?
C’est clairement la 2e réponse. La charge n’est qu’un outil pour produire un résultat. Si le choix de votre charge ne permet de faire que 5 rounds sur les 10 demandés, vous n’avez alors effectué que 50 % des répétitions. Quel est l’intérêt ? Si un athlète a besoin d’une minute de récup entre des répétitions d’un mouvement d’haltérophilie lors d’un WOD dédié au conditioning, son fitness serait bien mieux servi si on réservait les charges lourdes à un Heavy Day dédié à construire de la Force et de la Puissance.
Je suis donc dans le camp de Katzenbach : un ne râle pas, on ne négocie pas au sujet du RX. Respectez la ligne de conduite CrossFit :
Finissez sous le Time Cap ou oubliez la mention RX et admettez avoir modifié le WOD et altéré son objectif.
Au sujet de l’auteur : Mike Warkentin est le Managing Editor du CrossFit Journal ainsi que le fondateur de CrossFit 204.
Source : https://journal.crossfit.com/article/rx-warkentin-2
Auteur/Traducteur : Thomas PACYGA